Le quotidien du médecin du 8 Mars 2000
Le dénouement de trois mois de crise hospitalière
Une revalorisation en cinq actes
C'EST finalement 1,8 milliard de francs que le gouvernement s'apprête à débloquer d'ici à 2002 pour les
praticiens hospitaliers (PH), dont 955 millions de francs financeront dès cette année des actions ciblées :
· Dès le 1er mai, une indemnité de service public exclusif
A partir du 1er mai, tous les PH temps plein qui n'ont pas d'activité libérale toucheront une indemnité annuelle
de 25 000 F. Le montant de cette prime devrait monter en puissance : il atteindra 30 000 F à partir du 1er mai
2001, 36 000 F un an plus tard. Cette « indemnité de service public exclusif » concernera les médecins qui
exercent la totalité de leur activité au sein du service public, y compris quand ils y font de la recherche, de
l'enseignement ou une autre mission d'intérêt général que leur stricte mission de soins, soit environ 16 000
praticiens sur 22 000. Elle supposera un engagement des médecins, lui aussi dit « exclusif de service public »,
et qui devrait couvrir une période de trois ans. Le coût estimé de l'opération est de 250 millions de francs cette
année, puis de 570 millions de francs en 2001.
· Pour le 1er novembre, une revalorisation des carrières
La carrière des PH est réaménagée autour de trois axes. Les niveaux de rémunération de l'ensemble des
échelons sont tout d'abord revus à la hausse : les émoluments du premier échelon passent à 294 588 F
annuels - ce qui représente une augmentation de 16 % - et ceux du treizième échelon à 534 941 F (+ 0,5 %).
La carrière, désormais linéaire avec suppression des quotas statutaires, avance ensuite à un rythme plus
rapide. Sa durée totale passe de 25,5 à 24 ans ; aucun des 13 échelons qu'elle totalise ne peut durer plus de
deux ans, à l'exception du 12e.
Afin d'inciter les jeunes médecins à passer le concours de PH, l'entrée se fait dans la carrière au début du 4e
échelon de cette nouvelle grille. Ce dispositif coûtera en année pleine 510 millions de francs au gouvernement.
Il entrera en vigueur le 1er novembre 2000, avec reclassement à ancienneté conservée pour les praticiens déjà
en poste.
Le toilettage des carrières ne s'arrête pas aux seuls PH. Le protocole d'accord rappelle les aménagements
déjà en cours, financés cette année à hauteur de 100 millions de francs, pour les assistants et les chefs de
clinique (nouvelle grille de rémunération pour les statuts du postinternat, ouverture de la prime d'exercice
multisite aux assistants). Il pose également le principe d'une revalorisation, pour 110 millions de francs
en année pleine, du statut des quelque 4 000 médecins à diplôme étranger devenus, sur examens,
praticiens adjoints contractuels (PAC) : leur rémunération devrait augmenter en moyenne de 30 % et
il est prévu qu'un PAC ayant réussi le concours de PH voie son poste de PAC presque
automatiquement transformé en poste de PH.
· Au 1er septembre, une reconnaissance de la pénibilité de certains postes
Le détail de cette mesure n'est pas arrêté, mais le principe et le financement (150 millions de francs en année
pleine) sont acquis. Il va s'agir d'inciter financièrement les médecins à occuper des postes pénibles,
c'est-à-dire isolés, présentant des difficultés particulières d'exercice et durablement vacants. Fléchés dans les
établissements avec agrément des directeurs d'agences régionales de l'hospitalisation (ARH), ces postes
feront l'objet d'une liste qui sera revue avec les SROS (schémas régionaux d'organisation sanitaire).
Par ailleurs, la prime annuelle de 30 000 F liée à l'exercice partagé entre plusieurs établissements, qui existe
depuis janvier, va être remodelée. Ceci devrait permettre notamment de l'étendre aux praticiens qui exercent,
dans le cadre des nouveaux modes de coopération interhospitalière, sur plusieurs sites, mais à l'intérieur d'un
même établissement.
· A plus long terme, les PH doivent travailler moins, mieux, avec des garanties de sécurité et davantage de
responsabilités
Le protocole pose le principe de l'amélioration des conditions de travail des PH. Celle-ci devrait passer par
l'association des praticiens à la réduction du temps de travail à l'hôpital (quelque peu sibyllin, le texte évoque
une « forte implication des PH dans ce processus général »). Un délai de trois ans est par ailleurs prévu pour
la mise en euvre du repos de sécurité après une garde sur place.
Afin de renforcer la place des praticiens à l'intérieur de l'hôpital, dans le but notamment de les faire participer «
aux décisions internes au sein des établissements », des « formations spécifiques au management et à la
gestion » vont être proposées aux médecins. La mise en place des conseils de service va être relancée.
En matière de formation médicale continue (FMC), les hospitaliers disposeront, c'est acquis, d'un « dispositif
propre », qui donnera au praticien « une possibilité de choix sur son plan de formation en fonction de ses
besoins propres et du projet d'établissement ».
· Coup de pouce aux urgences et à la psychiatrie
Le chantier des urgences, déjà ouvert depuis près de un an, reste une priorité pour le gouvernement. En plus
des dispositions prévues par l'accord qu'ont signé les urgentistes en mai dernier, il devrait bénéficier d'un
financement complémentaire de 300 millions de francs en 2000. En outre, des groupes de travail devraient se
pencher notamment sur une définition précise des missions des services d'accueil des urgences ainsi que sur
l'évaluation de l'utilisation des moyens ciblés déjà attribués aux urgence.
L'avenir de la psychiatrie devrait faire l'objet, quant à lui, d'un vaste débat reposant sur un bilan des moyens
déjà attribués à ce secteur et de ses dernières évolutions.
K. P.
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Satisfaction des organisations de praticiens hospitaliers
L A grande majorité des organisations de praticiens hospitaliers se félicite de l'accord conclu avec le
gouvernement
· Le Dr Pierre Faraggi, président de la Confédération des hôpitaux généraux (CHG) affirme dans une
déclaration au « Quotidien » que « la plupart des revendications des praticiens hospitaliers ont été prises en
compte ».
Nous sommes satisfaits, poursuit-il, d'avoir obtenu une prime pour exercice public exclusif, même si elle est un
peu inférieure à ce que nous aurions souhaité. Nous étions en revanche plus ambitieux en ce qui concerne les
revalorisations de carrière » En revanche, estime-t-il, « les praticiens hospitaliers qui se trouvent au neuvième
ou dixième échelon n'ont obtenu que des aménagements mineurs. Sur ce dossier, nous sommes à mi-chemin
de ce que nous aurions voulu. Je pense cependant que ces efforts nous amèneront à souscrire au protocole
d'accord.
· Le Dr Rachel Bocher, présidente de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH) estime, quant à
elle, que la réunion qui s'est tenue entre les PH et Martine Aubry a conduit « à la rédaction d'un texte qualifié de
convenable et qui ouvre des pistes pour demain, concernant notamment la revalorisation intellectuelle et
financière ainsi que la responsabilisation des praticiens ». L'INPH se félicite principalement « de la
reconnaissance de l'exercice exclusif au sein du service public, même si, à titre d'exemple, la prime octroyée
n'apparaît que comme une première étape aussi bien qualitativement que quantitativement ». L'INPH se dit par
ailleurs satisfait que des négociations soient « ouvertes à bref délai (avant l'été 2000) pour une redéfinition des
tâches du praticien hospialier entre l'université et l'hôpital permettant une plus grande reconnaissance des
différentes missions (et notamment universitaires) des PH ».
· Le Syndicat national des médecins chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (SNAM-HP)
note que le protocole d'accord constitue « une avancée appréciable, attendue depuis très longtemps. Les
mesures immédiates sont essentiellement financières. Prises sous la pression conjuguée des syndicats, elles
améliorent de façon significative les émoluments du début de carrière ». Le SNAM-HP considère la prime de
service public exclusif comme « modeste mais symbolique » et estime que « la prise en compte des obstacles
au recrutement dans certains hôpitaux est amorcée par la prime d'exercice dans les postes difficiles ».
· Le Dr Hani-Jean Tawil, président du Syndicat national des praticiens adjoints contractuels (SNPAC)
se réjouit de l'issue des négociations : « Nous sommes très satisfaits des avancées obtenues, grâce
notamment à l'INPH. Pour les praticiens adjoints contractuels (PAC), trois principes ont été adoptés. Le
premier porte sur les conditions de travail : les PAC sont enfin considérés comme les autres catégories de
médecins et pourront, à ce titre, être représentés à la commission médicale d'établissement. Le deuxième
principe consiste à mettre en place une commission de suivi des postes PAC dans les hôpitaux. Enfin, le
principe selon lequel les postes PAC pourront être transformés en postes PH a été accepté. Chaque PAC
pourra se présenter au concours de PH avec l'assurance d'obtenir un poste PH. »
· Enfin, l'Intersyndicat national des internes des hôpitaux des villes de faculté (ISNIH) estime que les internes
sont « une fois encore oubliés » par l'accord. Les internes se disent profondément déçus et attendent « un
rendez-vous urgent avec les représentants du gouvernement afin d'obtenir rapidement satisfaction » sur la
définition de leur statut.
http://www.snpac.fr
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